Merci !

« Chaque français se souvient où il se trouvait le 07/01 lorsqu’il a appris l’abominable nouvelle de l’attentat terroriste de Charlie Hebdo.

Dès cet instant, hélas, ce journal pourtant méconnu par beaucoup et que peu lisaient, est entré dans l’intimité de chacun, subitement, douloureusement et profondément.

Nous avons tous pleuré et frémi pendant ces trois jours d’attaques sanglantes qui auront aussi frappé des policiers, parce que policiers, et des juifs, parce que juifs.

Nous avons encore pleuré et exhorté notre colère lors des différentes marches et hommages rendus dans tout le pays, puis lors des obsèques de chacun.

Oui, depuis lors, qu’on aime ou pas la presse satirique, les dessins, la caricature, bref la ligne éditoriale de ce journal, on « est » Charlie, selon l’expression devenue symbole d’une défense d’un certain mode de vie à la française : je suis Charlie.

Il n’est pas question, encore une fois, de goûts personnels artistiques ou politiques. Ainsi, si un tel drame avait touché le journal L’Equipe, tout français, amateur de sport ou non, qu’il soit lecteur ou pas du quotidien sportif, se serait senti tout aussi instantanément dépositaire de la mémoire et du combat de ce journal et pour la liberté de la presse sportive, et donc de la liberté tout court.

Ce journal a vu sa rédaction décimée parce que ses dessinateurs… dessinaient. Pour des gommes, des crayons et des pinceaux…

Mais, au moins, s’il y avait un motif d’espoir derrière tout cela, c’était bien que notre Nation, dans un véritable élan d’union nationale, avait bien chevillé au corps la défense des libertés fondamentales, dont celui de rire de tout, surtout des puissants. La nature humaine est ainsi faite qu’il faut parfois craindre de perdre quelque-chose pour se rendre compte à quel point on y est attaché.

Alors, comment se fait-il que depuis lors, bon nombre de dessins de Charlie Hebdo continuent à susciter autant de polémiques ? Certains n’auraient-ils rien compris, rien retenu, seraient à ce point déconnectés du réel et de la souffrance des français devant cette multitudes d’épreuves que font subir les ennemis de la République à nos concitoyens ?

Au moins, on pourrait penser qu’a minima par confraternité, les journalistes ne seraient pas de ceux-là.

Hélas, il n’en est rien.

A l’occasion de leur couverture du numéro du 08/11/17, voilà qu’une violente attaque concertée de plusieurs journalistes d’un autre organisme de presse, le journal en ligne Médiapart, a déferlé sur Charlie Hebdo.  Coup très bas où confraternité et sens de la mesure semblent renvoyer à un autre monde que le leur.

Cette « Une » moquait leur patron, coupable aux yeux de beaucoup d’observateurs de s’être fourvoyé avec le prédicateur intégriste TR et surtout avoir fait montre d’un aveuglement coupable devant les dérives communautaires, d’être sourd aux injonctions sexistes des intégristes religieux et enfin muet quant au soutien des vigies républicaines qui deviendront plutôt leurs bêtes noires en les amalgamant aux racistes et xénophobes de l’extrême droite française.

Voilà ce que ce dessin expliquait, comme toute bonne caricature, mieux qu’un long article.

Au lieu de faire profil bas voire, comme c’est leur droit le plus strict, de simplement critiquer cette une, il a fallu que Médiapart attaque ce journal. Le sommet de l’écœurement étant atteint par leur patron, qui a décrété que Charlie Hebdo « déclarait la guerre aux musulmans ». Employer ce vocabulaire dans cette période, alors que Charlie Hebdo est toujours menacé de mort et ses membres vivent sous protection policière, ne peut manquer de choquer les français.

Nous ne saurions rendre compte du dégoût et de la colère inspiré par cette violente et gratuite insulte, surtout en pleine période de souvenir de la tuerie de masse du Bataclan. Ou quand l’abject confine au sublime.

Plus que jamais, Viv(r)e la République soutient Charlie-Hebdo, et à travers lui renouvelle son soutien aux journalistes et dessinateurs de presse satyrique en France et dans le monde, et les remercie vivement pour leur travail qui œuvre pour le bien commun.

Merci Charlie. »

Sébastien Mounier, membre fondateur de Viv(r)e la République